Depuis plusieurs jours, la vie de Jeane Manson (74 ans) est chamboulée. Il y a environ deux semaines, la chanteuse a quitté l’Espagne où elle vit pour rejoindre Israël, où habitent ses deux filles. Shirel et Marianne sont à Tel-Aviv avec leurs cinq enfants. Depuis Vendredi 13 juin, la vie a basculé dans la guerre face à l’Iran. Jeane Manson a témoigné à plusieurs reprises ces derniers jours auprès des médias français BFM TV et Paris Match.
On peut lire son interview sur Paris Match :
« La « Ville qui ne dort jamais » n’a jamais aussi bien porté son nom ! Mes filles Shirel et Marianne vivent toutes les deux à Tel-Aviv depuis plusieurs années. Moi qui réside en Espagne depuis treize ans, je viens régulièrement leur rendre visite en Israël pour passer du temps avec elles et mes cinq petits-enfants : Hila Ya, 15 mois, Gabriel, 3 ans, Adiel, 6 ans, Luna, 16 ans et Liam, 17 ans. Cette fois, c’est particulier, je suis aussi venue pour être auprès de ma cadette, Marianne, qui doit accoucher en octobre de son deuxième garçon. Il est très important pour moi d’être présente à ses côtés pendant sa grossesse. Mais en atterrissant à l’aéroport de Ben Gourion il y a dix jours j’étais loin d’imaginer ce qui m’attendait…
Tout a commencé dans la nuit du jeudi au vendredi 13 juin, à 3 h du matin… Je dormais à poings fermés quand, tout à coup, la sirène a retenti. Je sais que dans ces cas-là, on dispose à peine d’une minute et demie pour se réfugier dans un abri anti-bombes. Or, il n’y en a pas dans la maison de ma fille Marianne à Yafo, où je séjourne au troisième étage ! Imaginez qu’en pleine nuit et au milieu d’un sommeil profond, vous devez vous lever, vous habiller, vous chausser, prendre vos papiers importants, dévaler à toute allure des tas d’escaliers pour vous rendre au bunker de l’hôtel le plus proche, situé à plusieurs minutes à pied ! Il y a vraiment de quoi paniquer ! Surtout si on se trouve avec un enfant de trois ans qui dort dans vos bras ! Pourtant, curieusement, je n’ai pas perdu mon sang-froid. J’ai respecté les consignes avec calme. Il faut dire aussi que ce n’est pas la première fois que je vis ce genre de situation. J’ai vécu des moments similaires quand je suis partie chanter en Syrie ou au Liban dans les années 1980 et aussi en octobre 2023 quand la guerre a commencé en Israël.
Cependant, cette fois, le contexte semble différent. Même si Israël dispose du Dôme de Fer [un système de défense aérien ultra performant capable d’intercepter des roquettes et des obus], nous savons que les missiles balistiques iraniens peuvent peser jusqu’à une tonne et être dévastateurs ! L’attaque qui a frappé la ville de Bat Yam dans la nuit de samedi à dimanche a fait huit morts et a détruit près de 64 immeubles résidentiels* ! C’est pour dire à quel point leur arme est puissante ! D’ailleurs, cela s’est produit à dix minutes à peine de chez nous ! Pendant une demi-heure, nous sommes restés enfermés dans le bunker à retenir notre souffle et à sursauter au bruit assourdissant d’énormes explosions. On avait l’impression que cela se passait au bout de notre rue !
Depuis cinq jours à présent, nous recevons au minimum quatre alertes quotidiennes ! En général, pendant la nuit. Du coup, je dors avec mes vêtements. Je garde mon téléphone et mon sac à main sur ma table de nuit. Ceci afin de gagner du temps pour rejoindre l’abri. Le plus dur, c’est au moment de la douche que je prends en quatrième vitesse de crainte qu’une sirène ne retentisse. Je n’ai pas envie de sortir dans la rue avec la tête pleine de shampoing !
Depuis cinq jours, la vie s’est arrêtée ici. J’ai l’impression de me retrouver de nouveau confinée en plein Covid ! Très peu de voitures circulent. On évite de quitter la maison car une attaque de missile peut survenir à tout moment. Nous devions nous rendre à un mariage ainsi qu’au gala de United Hatzalah, un organisme israélien de premier secours, mais tout a été annulé. Les rassemblements sont interdits et on doit éviter les déplacements. Je ne peux même pas aller voir ma fille Shirel qui ne vit pourtant pas loin. Je passe la plupart de mon temps sur ma terrasse, à observer le ciel, les oiseaux et à chanter avec eux. Un corbeau me tient compagnie tous les jours. Je lui chante “Oh when the saints go marching in” de Louis Armstrong et il me scrute du regard comme si j’étais folle [rires] ! Je prie aussi beaucoup pour la paix dans le monde. Je médite. Avec mon petit-fils Gabriel, on joue, on cuisine, on fait des cookies que l’on partage avec les voisins. Des Arabes israéliens avec qui on s’entend à merveille. Comme quoi le mélange des cultures est encore possible !…
Paris Match