Elle a des cerises sur son chapeau, la vieille.
Elle se fait croire que c’est l’été.
Au soleil, on s’sent rassuré.
Il paraît qu’la dame à la faux,
C’est l’hiver qu’elle fait son boulot.
C’est pas qu’elle tienne tant à la vie
Mais les vieilles ça a des manies,
Ça aime son fauteuil et son lit,
Même si le monde s’arrête ici.
Elle a la tête comme un placard, la vieille,
Et des souvenirs bien rangés,
Comme ses draps, ses taies d’oreillers.
Son tout premier carnet de bal,
Du temps où la valse, c’était mal,
Un petit morceau de voile blanc,
Du temps où l’on s’mariait enfant,
De son feu héros, une croix de guerre
De l’avant-dernière dernière guerre.
Elle a des cerises sur son chapeau, la vieille.
Elle se fait croire que c’est l’été.
Elle ne fait plus partie du temps.
Elle a cent ans, elle a mille ans.
Elle est pliée, elle est froissée
Comme un journal du temps passé.
Elle a sa famille en photos, la vieille.
Sur le buffet, ils sont en rangs
Et ça sourit de toutes ses dents.
Y a les p’tits enfants des enfants
Et les enfants des p’tits enfants.
Y a ceux qui viendraient bien des fois
Mais qui n’ont pas d’auto pour ça,
Ceux qui ont pas l’temps, qu’habitent pas là,
Puis y a les autres qui n’y pensent pas.
Elle a des cerises sur son chapeau, la vieille.
Elle veut s’faire croire que c’est l’été.
Elle a des cerises sur son chapeau, la vieille.
Elle se fait croire que c’est l’été.